Nicolas II, Le Dernier Tsar by Henri Troyat

Nicolas II, Le Dernier Tsar by Henri Troyat

Auteur:Henri Troyat [Henri Troyat]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Biographie
ISBN: 9782277234814
Éditeur: Flammarion
Publié: 1999-09-14T22:00:00+00:00


X

UN HOMME DE DIEU

QUI S’APPELLE GRÉGOIRE

Plus l’agitation politique gagne en profondeur, plus Nicolas et sa femme éprouvent le besoin de se cloîtrer dans leurs résidences suburbaines de Tsarskoïe Selo et de Peterhof. C’est autant la crainte des attentats que l’horreur du monde qui les pousse à vivre en reclus, loin de leur peuple et loin de la cour. D’un naturel sauvage et inquiet, Alexandra Fedorovna ne veut plus entendre parler de bals ni de réceptions. Elle n’a jamais eu le cœur à s’amuser. À présent, l’obligation de paraître en grande toilette, de sourire sur commande et de soutenir une conversation avec des importuns est au-dessus de ses forces. Même dans un cercle intime, elle garde un visage fermé. On la sent impatiente de se retrouver seule avec son mari et ses enfants. gée de quelque trente-cinq ans, elle est encore très belle, mais l’expression dure et hautaine de son visage décourage les sympathies. En fait, elle est continuellement sur ses gardes et craint de se trouver mal en société. À la moindre émotion, sa figure s’empourpre par plaques. Une soudaine faiblesse lui coupe les jambes. Alors, sans égard pour les invités, elle s’appuie au bras de son époux et murmure : « Nicky, now it is time to go.[143] »

Sa mauvaise santé est aggravée par la hantise de la maladie du tsarévitch. L’hémophilie qui s’est manifestée dès sa naissance ne laisse pas de répit à ses parents. L’enfant est âgé d’un mois lorsque Nicolas note dans son journal : « Alix et moi nous étions très inquiets à cause d’une hémorragie ombilicale du petit Alexis qui a continué avec interruptions jusqu’au soir. Il a fallu faire venir Korovine et le chirurgien Fedorov qui ont fait, vers sept heures, un bandage. Le petit était étonnamment calme et gai. C’était pénible de vivre ces moments d’angoisse. » Ainsi, très tôt, les parents d’Alexis savent à quoi s’en tenir. L’affection congénitale dont il souffre se traduit par des hémorragies fréquentes, accidentelles ou spontanées. La médecine étant impuissante à guérir ce mal, l’enfant doit mener une existence préservée : le moindre faux pas, une égratignure, un saignement de nez provoquent des hématomes douloureux, des accès de fièvre, des maux de tête. « Pourquoi ne puis-je pas jouer avec les autres garçons ? » gémit-il. Les blessures superficielles ne le dérangent pas outre mesure : il suffit, dans ces cas-là, d’un bandage serré pour arrêter le saignement. Les hémorragies de la bouche et du nez sont plus graves. Mais c’est surtout quand il se heurte à un meuble ou quand il tombe par terre que les douleurs sont intolérables. Le sang accumulé dans une articulation exerce une pression telle que le petit malade hurle et tempête, rendant le monde entier responsable de son supplice. La morphine pourrait le soulager. Cependant, les médecins craignent qu’il ne s’habitue à ce poison. Parfois il s’évanouit de souffrance. Alors on le soigne avec des bains de boue chaude et on le met au lit. Conscient de sa vulnérabilité, Alexis est un enfant capricieux, irritable et souvent autoritaire.



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